Nous avons connu, l’un des hivers parmi les plus longs de ces dernières années, non que le calendrier ait changé mais le nombre de jours consécutifs sans soleil et sans radoucissement majeur fut des plus importants. Un printemps chaud semble se dessiner malgré l’adage « en avril ne te découvre pas d’un fil ». Les alternances journées ensoleillées, pluie sont favorables pour l’abondance des fleurs et du nectar. le colza commence.
Etat des colonies
Les colonies n’ont pas souffert de la longueur de l’hiver. Du moins, celles qui furent très correctement nourries l’an passé et qui étaient resté puissantes tout l’été. D’ailleurs, leurs provisions ne sont pas totalement épuisées aujourd’hui. Le nourrissement liquide apporté les trop rares beaux jours de mars a fourni un abondant couvain. Aujourd’hui 6 avril des colonies sont sur 8 cadres de couvain et certaines ont déjà des cellules de reines. J’ai vu un apiculteru qui a ramassé un essaim hier et les bourdons sont déjà là.
Par contre, la casse est très élevée sur colonies trop faibles. Ceci veut dire que l’hivernage fut mal préparé. Trop de colonies étaient insuffisamment populeuses, les cadres de miel étaient probablement trop peu garnis et peut-être que les traitements contre les varroas furent insuffisamment efficaces.
Cela nous oblige à nous rappeler que le nourrissement massif d’été et les réunions à l’automne seront à faire de manière rigoureuse. Dans notre actuelle situation de grande fragilisation de l’environnement pour les abeilles, les conditions d’hivernage sont à travailler très spécifiquement.
La visite de printemps
Elle devrait être une des très rares occasions d’ouvrir les ruches et de bousculer tous les cadres. Opération à haut risque car non seulement on refroidit considérablement le couvain, pouvant par là même le tuer en partie, pire on peut écraser la reine par mégarde. A cette époque de l’année toutes les conditions ne sont pas encore réunies pour un remérage certain et la colonie sera sans doute condamnée à disparaître. En début de mois, dans les régions où la colonie commence juste son expansion, le pire est le déficit de mâles pour féconder la reine.
Donc aller vite, compter le nombre de cadres de couvain et en mesurer la surface par le nombre des paumes de la main qu’il représente. Est-il serré, continu? Si cette ponte est récente elle donne des plaques de couvain bien homogènes.
Noter ces observations. Vous ferez le lien par la suite avec les essaimages, la production du miel. Cherchez la reine pour vous assurer de sa présence. Si elle n’est pas marquée, faites-le c’est le moment, plus tard elle sera difficile à trouver dans une abondante population. Peignez la à la couleur de l’an passé, en rouge. Elle a au moins un an.
Agrandir le nid à couvain, et réduire varroa
Agrandir le nid à couvain en apportant des cadres bâtis s’ils ne sont déjà en place car les cirières ne sont pas encore assez nombreuses pour construire des rayons. Apporter deux cadres cirés pour renouveler les rayons. Ces cires sont mises en réserve sur les bords de la ruche. Elles seront mises au centre du nid à couvain fin mai seulement. Si vous conduisez vos Dadant sur 8 cadres, nul besoin de les rapprocher ultérieuremetn du nid à couvain. Ils y seront vite.
Pour lutter contre le varrroa, mettre en bordure du nid à couvain deux cadres de hausses bâtis. Les abeilles construiront des rayons en dessous, ils ne seront pas collés aux parois de la ruche et généralement ils sont faits de cellules de bourdons.
Une fois bâtis, pondus et operculés, soit vers la fin du mois d’avril, on retire ces cadres de hausses, on détruit ces rayons surnuméraires. On met à leur place les cires ou des rayons construits selon le temps et la force de la colonie.
Les repérer par une punaise, ils seront plus facilement identifiés.
Les cadres de hausse contiendront du couvain. pour ne pas les perdre on trouvera une ruche puissante qui mériterait prochainement une hausse sur laquelle tous ces cadres seront réunis dans une hausse vide, complétée, si besoin, de cadres bâtis vides.
Le miel y sera abondant rapidement.
Cette méthode contre Varroa, aujourd’hui largement préconisée, fait partie de ce que l’on appelle la lutte intégrée. C’est à dire la convergence d’actions vers le même objectif de réduction de la présence de cet acarien sans pour autant provoquer une infestation chimique des colonies par une approche purement médicamenteuse.
On utilise le goût des femelles pour pondre préférentiellement sur des larves de bourdons. En détruisant des rayons de couvain de bourdon on abaisse fortement la pression démographique de l’acarien sur la colonie. Sa dynamique de reproduction est considérable et il est bon d’en limiter très tôt la présence.
Nourrir après les manipulations lourdes
D’une manière générale toute perturbation forte de la colonie se traduit par un arrêt assez spectaculaire de son activité durant plusieurs jours. La remontée en température et la réorganisation de la colonie demandent du temps et de l’énergie. Il est bon de toujours donner un peu de sirop après chacune des amicales intrusions de l’apiculteur.
Si les floraisons ne sont pas surabondantes, ne pas hésiter à donner un peu de sirop pour favoriser la construction des cires réalisée uniquement en période de miellée.
Pour ceux qui ont une vitre de contrôle sur la face arrière de leurs ruches (Warré ou cadre témoin de Pasche), il est spectaculaire de constater que si on met un petit pot de sirop sur le trou du couvre cadre, dans les 24 heures on voit quantité d’abeilles avec des lamelles de cire sous l’abdomen, dès la fin du sirop, il devient plus difficile d’en repérer.
Équilibrer les colonies
Après avoir compté le nombre des cadres de couvain, en faire la moyenne entre les colonies les plus populeuses. Puis échanger entre elles des cadres de manière à les amener toutes au même nombre de cadres de couvain. Cette pratique a l’avantage de permettre une conduite uniforme par la suite de ces ruches qui auront toutes au même moment besoin de hausses, d’être récoltées, d’en suivre le risque d’essaimage…
Dans un mois, toute colonie qui ne serait pas au même niveau de développement du nombre des cadres de couvain que les autres, sera pointée comme ayant probablement une mauvaise reine, donc prévoir de la changer.
Le risque majeur de cette pratique est la dissémination des maladies du couvain. Ce qui est très grave en cas de présence de loque dans votre rucher.
Les autres colonies trop petites ne seraient pas boostées suffisamment par cet apport de couvain, elles ne feront pas plus de miel pour autant. par contre on les nourrira copieusement elles serviront à faire des essaims artificiels. Elles fourniront à l’occasion les cadres pour faire des nucléis, bref on les destine à faire des abeilles à défaut de pouvoir faire du miel.
Réunir les essaims avec les colonies de production
C’est le moment de faire les réunions des essaims de l’an passé avec les colonies destinées à la production. Cela permet de changer les reines et d’accroître fortement les populations. On prend un corps vide mis à la place de la colonie à remèrer. On y met au centre l’essaim sur ses cadres de couvain. De la colonie on retire les cadres de couvain que l’on met de chaque coté du nid à couvain, on y met ensuite les cadres de pollen, enfin ceux de miel.
On secoue toutes les caisses au dessus de la nouvelle colonie pour y faire tomber les abeilles. Un peu de sirop dans le nourrisseur pour calmer les agressions entre populations, et tout doit rentrer dans l’ordre. C’est le principe de base de toute réunion.
Dans une bonne conduite de rucher il est conseillé de produire autant d’essaims que de colonies de production. Dans l’état actuel des mortalités dues aux maladies, au temps et aux pesticides il faut forcer la nature, de manière à changer les reines tous les deux ans et à renforcer les colonies en avril. En mai, on fera de nouveau des essaims artificiels avec des reines d’élevage et des cadres de couvain pris dans ces ruches devenues surpuissantes.
Par précaution on pulvérise sur toutes les abeilles présentes sur les cadres une eau parfumée – essence d’eucalyptus de préférence mais tout parfum peut convenir, sirop de menthe, mélisse, lavande… thé ou café…
Conduire les colonies sur 8 cadres, la pose des hausses
Actuellement les colonies ne sont plus si populeuses que par le passé. Nombre de professionnels ont choisi de conduire leurs Dadant sur 8 cadres, au lieu des dix habituels. Les rives seront flanquées de partitions de 30 mm en polystyrène extrudé entrées en léger frottement. la colonie plus resserrée tient mieux sa chaleur et sera souvent en meilleure forme. Dans ce cas les hausses, non modifiées, seront à placer un peu plus tôt.
Deux indices sont à retenir, l’occupation des cadres de rive par les abeilles, l’apparition de construction des cires blanche en sur-épaisseur au sommet des cadres de corps et qui s’emplissent de nectar.
Ne pas s’inquiéter de la montée de la reine dans la hausse pour pondre, c’est le signe qu’elle fut posée trop tôt, ou que la chaleur extérieure n’est pas encore suffisante, ou que le nid à couvain est encombré en bas, le miel du corps sera monté progressivement.
Mettre une grille à reine n’a aucun effet, les abeilles laissent libre l’espace pour la ponte de la reine, celle-ci claustrée sous la grille, ayant froid ou manquant de place, réduit sa ponte .
Certains proposent de limiter le refroidissement de la ruche en mettant un couvre cadre entre la hausse et le corps. Ouvert en son centre d’un trou de 5 à 10 cm de diamètre. C’est une manipulation supplémentaire pas toujours efficace.
Sur de très fortes ruches, proches de zones riches en colza, une hausse peut parfaitement être remplie de ce miel. Il faut l’extraire rapidement car il cristallise en une quinzaine de jours. C’est un excellent miel, dont la très fine cristallisation est utilisée en le mélangeant à d’autres de façon à orienter la cristallisation vers celle du colza.
Dans les hausses on met quelques cadres cirés alternés avec des cadres bâtis, cela permet d’avoir des cadres de hausse d’avance et de remplacer les très vieux rayons. Les cadres de hausse vieillissent bien en général.
Rappel : l’élevage des reines
C’est le moment de nourrir les ruches éleveuses pour leur faire progressivement atteindre la limite de l’essaimage, condition pour obtenir une production maximum de nourrices capables d’élever de nombreuses cellules artificielles construites à partir des amorces en plastique que vous introduirez à partir du mois de mai.
Cette colonie aura une reine marquée, car courant mai, une semaine au moins avant l’opération de greffage, il faudra la retirer, poser sur la ruche une grille à reine métallique (les abeilles passent plus vite) une hausse équipée de cadres bâtis, y mettre la reine, nourrir.
Les abeilles viendront s’occuper de la reine et sa présence empêchera tout élevage royal en dessous.
Une semaine plus tard le couvain ouvert dans le corps de la ruches sera operculé, en principe aucun élevage royal ne sera commencé, ce qui devra être vérifié. Détruire les éventuelles les cellules de reines.
On enlève alors la hausse qui sera pleine d’abeilles, et de cadres de couvain ouvert. On pose le tout sur un plateau de sol, équipé d’une hausse contenant des cadres bâtis vides et quelques cadres cirés. Cette division nous donne un essaim artificiel et une colonie orpheline sans larves à élever sauf celles que l’on ajoutera par la suite.
Cette colonie fera office de starter et d’éleveuse. Elle sera opérationnelle durant trois semaines environ.
Suite AVril : le nourissement
Jean Riondet