Mars 2012 Un coup chaud un coup froid et Henri Renson qui nous quitte

Henri Renson, un sélectionneur, éleveur Belge s’en est allé. Il était un éleveur passionné de l’abeille Carnica, il avait travaillé et conduit en parallèle plusieurs dizaines de lignées depuis les années 1970, qu’il entretenait et maintenait par une technique de consanguinité élevée qu’il pratiquait par insémination artificielle à l’aide d’un appareil de sa conception particulièrement maniable, il fut ingénieur en mécanique de précision. Ses élèves venaient du monde entier et il a transmis son art à de nombreux professionnels et amateurs éclairés.

Outre ses compétences immenses et une expérience rare, Henri Renson était accueillant, compréhensif et ouvert à toute question, c’était un partageux. Sa générosité le conduisit à céder ses reines à des prix plus que modestes, assurant ainsi une large diffusion de son travail d’une exceptionnelle qualité. Nous avons perdu outre un excellent sélectionneur, un ami et un honnête homme au sens « classique ». Nous pensons à son épouse dont le poids de la solitude sera grand tant ce couple vivait de concert.

Bilan de l’hiver

Mars est le mois du bilan de l’hiver qui s’achève et des premiers travaux dans les ruchers. Après janvier très doux et fleuri, les colonies ont largement développé leur couvain, février finit rude et n’a pas manqué au dicton « le mois le plus court mais le pire de l’année ».

Aujourd’hui le bilan des colonies révèle de très fortes disparités.

Les premiers constats montrent des situations contrastées. De très faibles mortalités là où le couvain fut moyennement développé. Des mortalités conséquentes sur des colonies ayant de très beaux couvains fermés, les abeilles ne les ont pas quitté et sont mortes de froid et de faim dessus.
Je retiendrai tout de même que la pose de candi sur la tête des cadres et là où sont les abeilles, le tout recouvert d’une bâche à bulles un peu épaisse pour plus de commodité, a assuré bien des survies.
Je note également que les traitements antivarroa très long auront été payants quant aux infestations réduites aujourd’hui et aux survies.
Rappelons nous que l’infestation à venir par varroa sera fonction de la qualité des traitements en 2011. A prévoir d’éventuels traitements de printemps avec des lanières ou au Taktic si les tests révélaient de fortes présences de varroa en fin de mois.

Beaucoup de très belles colonies sont d’ores et déjà visibles. Par temps chaud aux alentours de 20°c j’ai ouvert mes ruches, plus de la moité sont déjà à plus de 3 cadres de couvain. mais certaines avec beaucoup de miel d’autres avec rien du tout, le nourrissement s’impose surtout que froid et pluie peuvent revenir. La pluie serait même très souhaitable!
Toutes ces colonies bien pourvues en couvain devront faire l’objet d’essaimage artificiel début avril.

Les plateaux de sol les plus propres signent les colonies fortes et sans doute nettoyeuses. A confirmer par le test du couvain mort.
Chaque plateau enlevé et sale sera nettoyé sur place avec un chalumeau, s’il ne supporte la flamme un plateau de rechange lui sera substitué et l’original emmené à la maison pur y être nettoyé sérieusement.
La désinfection des plateaux en plastique se fait par un premier brossage au lave pont avec de l’eau et du détergent de type Oxydrine ou lessive St marc en cristaux dissous dans de l’eau bouillante pour que l’application d’une lessive bien chaude ramollisse au mieux les parties de cire et dissolve un peu toutes les saletés. Si on dispose d’un nettoyeur haute pression, on passe tout le matériel au choc du jet d’eau. Puis on applique un nouveau brossage avec une eau javellisée,(4,75l d’eau et un berlingot de javel à 9,6°), l’idéal serait de pouvoir laisser tremper les plateaux dans un bac durant une bonne dizaine de minutes. Certains modèles de « comporte champenoise » pour les vendanges (675mm x 500mm) sont à la taille des plateaux de sol plastique.

Nourrir
Les colonies affamées seront immédiatement nourries. Un pain de candi ou du sirop ?
Tant que les nuits sont en dessous de 10°c il faut donner du candi. Le sirop trop froid n’est pas pris et les abeilles dépensent de l’énergie pour entretenir cette masse froide au dessus d’elles (couvre cadre nourrisseur, le plus apte à permettre aux abeilles de prendre du sirop tôt en saison). Dès que les nuits seront plus chaudes, le sirop est utilisable. Mais si la chaleur de la journée est élevée, en pleine journée donner un coup de sirop chaud (1/2 l) peut booster la ponte de la reine. Y ajouter des protéines (levure de bière lyophilisée, farine de soja déshuilée dans la proportion d’environ 3%) ou du Provita Bee donnent aux nourrices des éléments nutritifs facilitant la production de gelée royale. Attention à ne pas mettre les colonies en positon de démarrer des essaimages par des nourrissements successifs, sauf application de techniques particulières.
Dans les sirops ajouter des décoction alcooliques de type Protofil ou Apiherb, ces compléments alimentaires améliorent la résistance à la Nosémose.
L’acide acétique (vinaigre blanc ou mieux vinaigre de cidre qui apporte du potassium) participe aussi de la prévention de la Nosémose.
Le sirop est 50/50 c’est à dire 1k de sucre pour 1l d’eau. Je rappelle la méthode simple pour faire ce sirop, prendre une bouteille en plastique de 2l, la remplir avec un kilo de sucre cristallisé, ajouter de l’eau chaude pour compléter, le sirop est à peu près 50/50.

Mon ami Henri Renson m’a toujours fait mettre 2cl par litre de sirop d’une décoction de propolis à saturation dans de l’acool à 60°. Je n’ai jamais vraiment connu de ruches infestées de Nosémose.

Limiter l’essaimage
Les colonies sur 4 cadres de couvain bien remplis, risquent l’essaimage (toutes autres considérations d’âge de la reine, de lignée essaimeuse… mises à part).
Fin mars, mettre dans une ruchette plastique un cadre de couvain fermé, les abeilles qui sont dessus, un cadre de miel, une cire, et 700 g d’abeilles prises sur une ou plusieurs ruches par secouage de cadres de couvain. Ce qui représente environ 20% des abeilles de la colonie à cette époque de l’année. Il faut y introduire une reine en ponte de l’an passé. Soit on dispose de nucléis qui ont bien hiverné, soit on achète des reines chez les éleveurs importateurs. De l’autre hémisphère les reines arrivent toutes les semaines puisque les apiculteurs sont en en fin de saison apicole. Nos éleveurs n’auront pas de reines disponibles à la vente avant fin mai.
Pour faire des essaims sans reine, il faut ajouter un cadre de couvain ouvert avec œufs pour être certain de disposer de larves susceptibles d’être élevées en reines. Mais ce n’est jouable que courant avril, il faut des bourdons matures pour assurer les fécondations.

Vespa Velutina
Des messages nous sont envoyés pour démarrer les campagnes de piégeage de Vespa Velutina là où il se trouve. J’ai interrogé le Muséum National d’Histoire Naturelle à Paris pour connaître leur position. Quentin Rome, chercheur du MNHN spécialisé sur cet insecte, m’a fait une très longue réponse d’où il ressort que le piégeage précoce n’a pas d’intérêt car moins de 10% des femelles Vespa Velutina fonde un nid. La probabilité pour attraper celle qui sera fondatrice est très faible et en revanche on piège nombre d’insectes qui n’ont pas à l’être. D’autre part aucun piège n’évite le massacre car les insectes piégés sont surchauffés dans les pièges et s’ils en sortent ils sont le plus souvent de vie courte et généralement devenus stériles.
Ce qui distingue l’abeille des guêpes et frelons est le mécanisme de la reproduction des populations. Une reine d’abeille naît, une nouvelle colonie se fonde par essaimage. A chaque reine une nouvelle colonie, là le slogan est bon. L’hiver venant une population survit et redémarre la saison suivante sa reproduction sera liée à un nouvel essaim.
Chez guêpes et frelons, les populations meurent à l’automne. Survivent seulement des reines qui sont ou non fécondées et dont le premier travail de printemps sera de construire une amorce de nid, d’y pondre et d’y élever des larves jusqu’à la naissance d’ouvrières. Mais l’énergie requise pour atteindre ce but est telle que nombre de reines font la guerre aux autres pour leur voler leur nid et cette compétition aboutit à un véritable massacre des reines entre elles. Là le slogan est faux.
Par contre, le piégeage est utile dans deux circonstances, pour connaître au plus tôt les zones d’infestations par Vespa Velutina, donc ce seront des piégeages en nombre limité, et pour défendre les ruchers attaqués ce seront des piégeages massifs pour faire en sorte que le nombre des prédateurs diminue et éviter qu’ils rapportent l’information à leurs congénères sur les lieux de festin.
Un piégeage précoce épuisera inutilement l’énergie des apiculteurs alors qu’un piégeage opportun leur demandera beaucoup de travail pour limiter la casse dans leurs ruchers.
L’autre activité, très importante, qui est celle de la destruction des nids, relève d’une organisation qui dépasse la seule intervention individuelle et doit être conduite sous l’autorité des GDS apicoles.

L’argumentaire détaillé de Quentin Rome vous sera envoyé sur simple demande.

Jean RIONDET
jean.riondet@gmail.com

Auteur Jean Riondet

Apiculteur de longue date, Jean Riondet est un passionné qui aime apprendre et transmettre. Parallèlement à l’entretien de ses ruches, il enseigne l’apiculture depuis plus de 35 ans dans la région lyonnaise. Auteur d’un premier ouvrage, Un rucher dans mon jardin (Nathan, 1995), il rédige depuis l'an 2000 diverses rubriques d'abord dans la revue Abeilles et fleurs, puis dans la revue L'abeille de France. Il anime le blog de conseils apicoles sur Beehoo. Ses ouvrages actuellement disponibles : L'apiculture mois par mois - Le Rucher durable - Installer un premier rucher - Élever ses reines, trois méthodes simples. Il participe activement au Groupement d'action sanitaire apicole du Rhône (GASAR) qui assure la formation continue des apiculteurs du Rhône https://gasarhone.fr/ Jean Riondet est chevalier dans l'ordre du Mérite agricole

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