Mars les violettes sont en fleurs les colonies explosent

Chez moi dans la Métropole de Lyon, les colonies explosent, la CH1 est déjà dotée de 4 cadres de couvain quasiment au carré. Certaines sont en pleine forme d’autres démarrent doucement questions d’état de santé l’an passé, mais aussi de lignée. les descendantes de Buckfast ont tendance à démarrer comme des bombes dès que le pollen arrive, celles qui sont issues d’une origine Carnica sont plus lentes à démarre puis leur développement s’accélère pour rejoindre leurs consœurs.

Essaimage

C’est le risque avec les floraisons des Cornouillers, Loniceras, Véroniques de perse, Pâquerettes, Prunelliers, pissenlits et bientôt les pêchers dont les bourgeons sont gonflés et déjà bien roses.

On peut s’attendre à ce que les premiers essaims apparaissent dès la troisième semaine de ce mois chez nous. La fièvre d’essaimage est un phénomène naturel que l’apiculteur cherche à éviter, en cela il est un éleveur au sens fort du terme. Le mécanisme est essentiellement lié à la baisse de la quantité de phéromone royale dans la colonie et notamment au niveau des nourrices. Ces phéromones bloquent le comportement d’élevage de cellules royales, déposées via ses pattes par la reine en se promenant sur les rayons, lorsque la densité des abeilles nourrices augmente la reine sera maintenue largement au centre des rayons par les abeilles qui l’entourent, de sorte que la périphérie du couvain étant moins visitée, les nourrices en ces endroits seront peu baignées de ces phéromones, d’où leur propension à créer des cellules royales.

Mais les phéromones royales seront moins abondantes si la reine est âgée, rares sont les reines nées l’année précédente qui essaiment, mais on ne peut ignorer l’effet lignée, les conditions de survie de l’espèce étant liée à ce phénomène d’essaimage. La nature est féroce car le taux de survie des essaims naturels est faible, pas supérieur à 20% indique Thomas Seeley, ce chercheur américain spécialiste des abeilles sauvages. Avec un taux de survie aussi faible et un nombre d’essaims produit par chaque colonie lui aussi très faible entre un essaim et 3 les années où les colonies essaiment, l’existence des abeilles depuis des dizaines de millions d’années est du au fait que l’essaimage est inscrit au plus profond de leurs gènes. Ce qui signifie pour nous une assez grande difficulté de blocage de ce mécanisme.

On observe cette mise en place du phénomène lorsque des amusettes apparaissent en quantité, que la ponte de la reine se réduit, que la surface de couvain fermé excède largement celle du couvain ouvert. Et bien évidemment la situation est irréversible lorsqu’apparaissent des cellules royales.

En ruche RBC le risque d’essaimage est plus faible du fait que le nombre des cadres en CH1 est réduit, c’est à dire que les abeilles et la reine se promènent sur moins de surface qu’à l’habitude avec un corps non partitionné, que l’excédent d’abeilles va passer en CH2 laissant davantage de possibilité aux nourrices d’être au contact des phéromones royales. D’où l’intérêt, si la ponte de la reine n’est pas explosive, de rester sur 4 à 6 cadres en CH1 pour concentrer les phéromones royales sur un nombre réduit de cadres laissant la possibilité au nourrices de s’en imprégner. L’autre avantage de ce resserrement du couvain est d’arriver, si on en a un peu la chance avant d’en maitriser le pilotage, avec une CH1 totalement couverte, ou presque, de couvain fermé ce qui pousse les burineuses à butiner du nectar pour stocker alors que le couvain ouvert, par ses phéromones, pousse au butinage de nectar et de pollen pour élever. On passe directement de la phase d’expansion de la colonie à la phase stockage sans passer par celle de l’essaimage.

Agrandir trop rapidement la CH1 c’est accroitre la surface de ponte et disperser les phéromones royales. Encore faut-il que tout concorde et que la météo ne vienne pas tout perturber ce qui n’est jamais acquis ! Pour bloquer le processus d’essaimage on pourra poser une hausse très tôt dès que la CH1 sera blindée de couvain fermé. Pour éviter un refroidissement excessif du nid à couvain on posera sur la CH1 un mouchoir, feuille de thermo-réflecteur couvrant en largeur la CH1 et en longueur rétréci de 5 cm aux deux extrémités pour laisser passer les abeilles et monter dans la hausse pour stocker le nectar. La hausse sera partitionnée avec des Pihpettes, partitions isolées et réfléchissantes au format des cadres de hausse et placées le plus possible à l’aplomb des partitions (PIHP) dans le corps de manière qu’entre la CH1 et la hausse se forme une cheminée qui sera chaude car bien isolée et pas trop grande. Une surveillance s’imposera car la vitesse de stockage peut être phénoménale si les circonstances météo et florales sont de la partie. On ajoutera des hausses, toujours partitionnées à l’identique et séparées les unes des autres par un mouchoir pour maintenir sur le groupe le rayonnement des abeilles en train de travailler la concentration du nectar.


Avec un grand mouchoir sur le corps, la grille à reine n’est pas toujours nécessaire pour empêcher la reine de monter dans les hausses, mais si le risque est avéré, on mettra une GR soit sur le mouchoir du corps soit sur la première hausse au cas où la reine ne passerait pas en CH2 pour venir y pondre. Intérêt de cette pratique, la hausse se remplira de couvain puis de pollen et ces cadres pourront être mis de côté par la suite pour apporter ces précieuses protéines en fin de saison pour la fabrication des abeilles d’hiver.

Au cas où la colonie exploserait, on peut freiner son développement et le risque d’essaimage en faisant des essaims sur 1 cadre de couvain avec bien des abeilles mis entre 2 PIHP, dès que l’on voit des mâles sur les planches d’envol se balader l’après midi.

On peut aussi bloquer l’effet essaimage suite à l’explosion du nombre des nourrices lors des naissances massives en CH1 par apport d’un cadre à construire. En occupant les cirières dans la ruche plutôt qu’à les destiner au départ pour créer un nouveau nid on bloque ainsi la fièvre d’essaimage.

Tout est question d’expérience et de connaissance du comportement de ses lignées. Il est de ce fait bien intéressant d’avoir des ruchers homogènes c’est à dire issus de sa propre sélection par reproduction systématique des colonies qui présentent une grande stabilité comportementale. C’est le message que nous a donné Sébastien Bonjour lors du webinaire du 27 février dernier en détaillant sa méthode de sélection. Ne pas sélectionner, même a minima, c’est en réalité sélectionner des colonies essaimeuses, ça c’est de l’apiculture naturelle !

François Penin

Notre collègue nous propose sa manière de gérer les fortes miellées de Colza, en voici le déroulé

A la réflexion, il y a un aspect où j’ai pas mal galéré pour arriver à gérer : le problème d’essaimage au moment de la floraison des colza. Voilà comment je pratique dans les grandes lignes :

1- avoir des reines les plus jeunes possible. Idéalement des reines nées en Juillet-Août car leurs colonies se développes plus lentement au printemps et n’ont donc pas tendance à essaimer sur le colza . 

2- ne pas stimuler les colonies en février-mars pour limiter leur développement sinon c’est l’essaimage assuré !

3- faire des essaims artificiels le plus tôt possible pour dégraisser les colonies. 

4- surveiller la présence de Cellules Royales : quand il commence à y en avoir c’est très difficile d’empêcher l’essaimage. La méthode que je pratique à ce moment là, est de diviser la colonie en deux :

  • La partie avec la reine est déplacée dans un autre rucher à plus de 3 km et bien sûr les CR détruites. Généralement cela bloque l’essaimage mais il arrive que la vieille reine soit remplacée. Cette colonie va se refaire et sera productive fin mai – début juin.
  • Pour la partie qui reste sur place sans reine je ne laisse qu’une CR. Cette colonie récupère toutes les butineuses et va faire une belle récolte de colza. Bien sûr à surveiller de près pour le traitement anti varroa en absence de couvain juste avant la ponte de la nouvelle reine. En plus du colza cette colonie va être productive en juin et en septembre sur le lierre. 

La division de colonies en pleine période de production peut paraître aberrante mais en fait ça ne bloque pas la production de miel de colza. D’ailleurs en général quand je fais le total de miel produit sur toute la saison par les 2 colonies issues de la division, la production est supérieure aux colonies qui n’essaiment pas ! Et en prime j’ai une colonie de plus ! 

Le frelon à pattes jaunes

C’est l’époque du piégeage de printemps, à faire durant 2 mois selon les préconisations locales jusqu’en mai environ. Le plan national frelon vient d’être publié, il sera prochainement disponible sur

https://fnosad-lsa.fr/infos-sanitaires-reglementaires/plan-de-lutte-contre-les-maladies

ou téléchargeable maintenant depuis

Auteur Jean Riondet

Apiculteur de longue date, Jean Riondet est un passionné qui aime apprendre et transmettre. Parallèlement à l’entretien de ses ruches, il enseigne l’apiculture depuis plus de 35 ans dans la région lyonnaise. Auteur d’un premier ouvrage, Un rucher dans mon jardin (Nathan, 1995), il rédige depuis l'an 2000 diverses rubriques d'abord dans la revue Abeilles et fleurs, puis dans la revue L'abeille de France. Il anime le blog de conseils apicoles sur Beehoo. Ses ouvrages actuellement disponibles : L'apiculture mois par mois - Le Rucher durable - Installer un premier rucher - Élever ses reines, trois méthodes simples. Il participe activement au Groupement d'action sanitaire apicole du Rhône (GASAR) qui assure la formation continue des apiculteurs du Rhône https://gasarhone.fr/ Jean Riondet est chevalier dans l'ordre du Mérite agricole

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