Octobre 2012 L’apicuture française à Agen : un franc succès

Revenant de 4 journées passées à Agen j’en reviens plutôt optimiste.

Certes, les problèmes sont toujours là, mais les connaissances évoluent, les positions politiques également. Le travail de communication réalisé par l’UNAF depuis plusieurs années porte ses fruits et le dialogue entre apiculteurs n’est plus aussi tendu que par le passé. Sans doute, des Ayatollah se manifestent régulièrement mais c’est un folklore consubstantiel d’un secteur où des professionnels, qui ont besoin de compromis leur permettant de vivre de leur activité, côtoient des amateurs dix fois, cinquante fois voire cent fois plus nombreux qu’eux selon les départements et peu disposés à transiger sur la survie de leurs colonies.

Chaque demie journée avait son intérêt. Sans doute n’y a-t-il eu aucune information fracassante mais des confirmations, des travaux d’études et de recherches qui affinent progressivement des orientation sur des pratiques à creuser par les professionnels. Mais les pesticides systémiques sont toujours là et produire du miel dans ce contexte avec varroa rend le travail faiblement rentable, la diversification des activités autour de l’abeille s’impose. Les témoignages des professionnels sur de point furent particulièrement instructifs.

Varroa : un ennemi à ne pas sous estimer. Il ponctionne les protéines de l’abeille, ce qui abaisse le niveau de ses défenses naturelles et permet l’expression de viroses et d’agents infectieux naturellement présents dans leur tube digestif. Sa durée de vie en est profondément affectée, l’été on le voit peu du fait de la dynamique de reproduction des abeilles, mais c’est catastrophique l’hiver où elles meurent de vieillesse prématurément. A suivre les publications à venir des chercheurs de l’École nationale vétérinaire de Nantes en lien avec la FNOSAD.
Trop de traitements sont approximatifs et les chercheurs ont montré la difficulté à valider l’efficacité de telle ou telle méthode, tant la chute naturelle du varroa peut être importante selon les circonstances. Il est donc toujours nécessaire de vérifier le niveau de chute de varroa chaque jour durant plusieurs jours avant le traitement pour pouvoir interpréter l’efficacité du traitement en cours. Se méfier des fourmis friandes des varroas et qui faussent les mesures en venant rapidement les emporter des langes.
Dernier enseignement que je retiendrai est l’importance des traitements précoces en été, c’est à dire faire la récolte dès la fin des grandes miellées puis nourrir et traiter contre varroa de suite pour développer des abeilles d’hiver non parasitées et non carencées en protéines.

Pesticides : les produits systémiques sont dangereux à très faibles doses. Les chercheurs de Clermont Ferrand et de l’INRA d’Avignon confirment l’agression de ces produits sur la paroi intestinale des abeilles rendant cette paroi perméables aux spores de Nosema et autres viroses. Ces résultats sont d’autant plus importants que ces doses sont inférieurs aux dl 50 retenues dans les études pour les autorisations de mise sur le marché. En effet ces doses à partir desquelles meurent au moins 50% d’une population sont valides en l’absence d’infestation important des abeilles par Nosema par exemple.

Maïs Bt : Les présentations sur les problèmes posés par les OGM ont montré clairement les mécanismes à l’œuvre et pas toujours bien compris des apiculteurs tant les débats d’experts sont complexes. Pour aller vite, le bacille de Thuringe produit une protéine qui, dans le tube digestif de la larve de la teigne, perfore les cellules y faisant entrer des bactéries et viroses qui la tuent.
Cette protéine est constituée de plusieurs éléments dont un qui l’inactive. Cet élément d’inactivation est dissout dans l’intestin de la larve de teigne du fait de son Ph (mesure de l’acidité). Or, chez l’abeille, le Ph intestinal n’est pas le même et il ne permet pas la dissolution de cet élément d’inactivation de la protéine qui, de ce fait, n’est pas toxique pour l’abeille.
Le Maïs dit Bt ne produit pas le bacille de Thuringe, mais sa protéine, c’est la même sauf l’élément d’inactivation qui est absent rendant cette protéine toxique pour la pyrale mais aussi pour les abeilles et pour tout un ensemble d’insectes et de vers vivants dans les sols. Du coup cette protéine agit de manière non sélective contre tout un ensemble d’être vivants nécessaires à la bonne conservation du substrat végétal.

Vespa Velutina : les passions sont exacerbées entre chercheurs et apiculteurs qui voient leurs colonies anesthésiées avant d’être détruites par le frelon. C’est en cet endroit que les affrontements furent violents avec des incompréhensions d’envergure. J’en ai retiré quelques réflexions à travailler.
Aucun piège n’est vraiment sélectif et si on tue trop d’insectes on risque de réduire plus encore les autres ressources alimentaires de Vespa Velutina ou de certains de ses prédateurs qui commencement à apparaitre, orientant plus encore sa prédation sur les colonies d’abeilles. La recherche s’orienterait vers la détection de phéromones susceptibles d’attirer mâles ou femelles et d’empêcher la reproduction. Cet axe semblerait possible car on pense qu’il y a peu de lignées génétiques différentes chez les Vespa Velutina importés d’Asie. En effet les phéromones sont des signatures spécifiques à chaque insecte, à chaque famille, à chaque lignée, il est donc difficile de trouver un produit universel si le nombre des lignées est important.
Les chercheurs pensent que le piégeage généralisé du printemps favorise sans doute la multiplication de petits nids, néanmoins sur la proposition et l’expérience d’un maire ils ont convenu que serait à explorer une stratégie qui conduirait à piéger systématiquement dès février (pour le Sud Ouest) dans un rayon de 200 m autour des lieux où ont été trouvé des nids à l’automne précédent. Les femelles vont nicher proche de ce nid pour passer l’hiver à l’abri du froid et tentent de fonder un nouveau nid en fin d’hiver dans un rayon pas très éloigné. Les mesures faites par un syndicat d’apiculture sur le nombre des nids observés suite à ces piégeages montreraient une stabilisation voire une régression possible du nombre des nids observables sur la zone en fin de saison.
Mais l’éradication n’est plus à l’ordre du jour. D’une manière générale la dynamique de reproduction des populations d’insectes est tellement forte que leur disparition à l’échelle de notre temporalité d’apiculteur est illusoire, on peut seulement espérer faire baisser la pression démographique en un lieu.
D’ailleurs le classement de cet insecte en espèce nuisible (ce qui permet la mobilisation des services de l’État et des collectivités pour organiser la lutte) et en espèce exotique invasive (ce qui autorise l’utilisation des programmes européens) est en route, les deux Ministres de l’écologie et de l’agriculture ont engagé le processus de classement, une consultation publique est en cours sur le projet d’arrêté.
A suivre les travaux des chercheurs de Tours qui travaillent sur la connaissance de cet insecte très toxique chez nous alors qu’en Asie il est recherché pour ses larves largement consommées par les populations locales. C’est pour cela qu’il ne fait pas l’objet de beaucoup de recherches en Asie.

J’ai aussi retenu des conférenciers de l’ANERCEA de bonnes idées qui simplifieraient grandement l’élevage des reines, j’en reparlerai plus tard.

Les marchands de matériel ne sont pas en reste,sans vouloir parler d’innovations marquantes je me suis pris à rêver devant tout un ensemble de productions :

  • Un camping car équipé en miellerie à un prix tout à fait compétitif pour un apiculteur disposant de ruchers sédentaires en de nombreux endroits éloignés.
  • Les pastilles métalliques de marquage des reines vendues avec un stylo bille porte aimant rétractable pour prendre la reine sur son cadre (70 euros) … qui pourraient peut être servir pour repérer avec un détecteur le cadre où se trouve la reine lors d’une ouverture de ruche.
  • Une ruchette Dadant 6 cadres finlandaise importée en France en polystyrène de très haute densité (100k au m3) avec partition centrale permettant de faire deux nuc sur 3 cadres Dadant avec couvre cadre nourrisseur à 2 entrées isolées.

En conclusion, un très bon congrès, beaucoup de monde, le loueur de chaises en aurait placé 1400 dans la salle de conférence pour plus de 1000 occupées !

Les travaux du mois : Ayant réalisé pour le compte du GDSA 69 un certain nombre de visites sanitaires dans des ruchers de collègues, j’ai constaté deux choses.
Ceux qui ont récolté tôt en saison, c’est à dire en général en juillet, qui ont traité contre varroa et nourri abondement à ce moment là, leurs colonies ont de bonnes réserves.
Mais, sauf à ce que l’apiculteur ait eu l’attention portée sur le volume du couvain en été, souvent les populations sont trop peu nombreuses. Les risques de mortalité hivernales sont grands.
J’avais attiré l’attention sur ce point lors de mon précédent billet, les faits confirment que les floraisons tardives et les miellats n’ont pas suffit pour relancer en masse la ponte des reines.
Donc il faut peser toutes les ruches et suivre de près cet indicateur. Une ruche Dadant 10 cadres avec un toit en tôle et un couvre cadre nourrisseur en bois posée à l’aplomb de sa face avant sur son support doit atteindre au minimum 20 k en pesée arrière.
Les pesons ne sont pas coûteux, au congrès un peson à ressort d’origine germanique coutait 12 euros et pour un prix encore inférieur, des pèses valises électroniques sont disponibles sur internet. Je me suis racheté un peson à ressort, pour me mettre à l’abri des pannes !
Dés que l’on atteint 17 k je suis partisan de mettre du candi protéiné sur la tête des cadres directement là où sont les abeilles.

Jean RIONDET

Auteur Jean Riondet

Apiculteur de longue date, Jean Riondet est un passionné qui aime apprendre et transmettre. Parallèlement à l’entretien de ses ruches, il enseigne l’apiculture depuis plus de 35 ans dans la région lyonnaise. Auteur d’un premier ouvrage, Un rucher dans mon jardin (Nathan, 1995), il rédige depuis l'an 2000 diverses rubriques d'abord dans la revue Abeilles et fleurs, puis dans la revue L'abeille de France. Il anime le blog de conseils apicoles sur Beehoo. Ses ouvrages actuellement disponibles : L'apiculture mois par mois - Le Rucher durable - Installer un premier rucher - Élever ses reines, trois méthodes simples. Il participe activement au Groupement d'action sanitaire apicole du Rhône (GASAR) qui assure la formation continue des apiculteurs du Rhône https://gasarhone.fr/ Jean Riondet est chevalier dans l'ordre du Mérite agricole

6 résponses de Octobre 2012 L’apicuture française à Agen : un franc succès

  1. Pingback: Chantal GIRIER

    • Pingback: jean

  2. Pingback: Larrouturou François-Maie

    • Pingback: jean

  3. Pingback: buffard myriam

    • Pingback: jean

Laisser un commentaire

Apiculture