Août ne diffère guère de juillet, les revues font relâche comme beaucoup d’entre nous aux multiples activités. Seuls les professionnels poursuivent inlassablement leur travaux de récolte, de traitement des reines et des essaims, de la vente pour tous ceux qui, sur les marchés et les zones de chalandise, passionnent les touristes.
Coté traitements
Les conseils de juillet perdurent, il faut traiter au thymol maintenant dès la récolte faite. Mettre une plaquette de thymol cassée en deux à deux extrémités de la ruche, puis une à deux semaines plus tard en mettre une seconde. Le traitement avec les lanières se fera courant septembre. Le nourrissement massif sera fait jusqu’au 15 août au plus tard de manière à laisser un maximum de délais aux colonies pour qu’elles puissent se reproduire sans donner aux nouvelles abeilles la charge de traiter les réserves d’hiver.
Le sale boulot étant fait les nouvelles générations pourront se peindre les ongles et se prélasser jusqu’au retour des beaux jours l’an prochain.
Nourrir ! Ne pas oublier les essaims
Eh oui, tant pour les colonies de production il est important de ne pas traîner sur le nourrissement, par contre pour les essaims qui ne seraient pas encore assez forts en population un petit nourrissement stimulant de 250 ml de sirop par semaine s’impose jusqu’à la fin du mois. Poursuivre serait à risque.
Pour les essaims trop faibles, une solution consisterait à leur apporter un cadre de couvain fermé, sans abeilles dessus. C’est un apport massif de population très bénéfique pour la colonie cela en accroît le rajeunissement et lui donne une forte dynamique. La seule limite de cet apport est le risque de transmission des maladies du couvain. Cet apport n’est à faire qu’en cas de colonies certainement saines. Cadres très remplis de couvain, cellules d’ouvrières bien serrées, peu de trous, pas de larves non operculées, pas d’opercules affaissées, pas d’odeur nauséabonde…
La Warré
Pour reprendre mon périple sur la Warré, dont j’ai déjà 10 corps occupés en deux mois, je me suis amusé à tester les trois types de cadres.
Les barrettes simples, les barrettes de Gilles DENIS équipées de leurs montant de 7 cm sur les 2 cotés de la barrette et les cadres de type Gatineau, c’est à dire des cadres classiques à 4 cotés faits dans du bois mince, 8 mm.
Certains apiculteurs font tailler des cadres pour Warré copie conforme des cadres Dadant ou Langstroth avec des têtes de 20 mm. C’est un gaspillage d’espace qui réduit les qualités de la Warré notamment du coté de la chaleur.
Une variante qui conserverait les qualités « Warré » serait la solution de Roger Delon, auteur de la ruche « climatstable », une barrette équipée d’une feuille de cire sur toute la surface du rayon bordée d’une tige métallique rigidifiant l’ensemble.
Les barrettes simples équipées d’un tout petit morceaux de cire gaufrée ou d’une simple ligne de cire fondue sont très difficiles à manipuler. Si on ouvre fréquemment on limite un peu le collage des rayons contre les parois, mais ce n’est pas fait pour cela. L’abbé Warré suggérait même de clouer les barrettes.
C’est la preuve que la visite de ce type de ruche ne se fait pas rayon par rayon. C’est une visite corps par corps. On penche le corps on le regarde par le dessous, les rayons pleins de couvain peuvent être légèrement déplacés avec un doigts pour mieux voir entre eux.
Les corps contenant du couvain ne sont jamais soudés entre eux car le va et vient incessant des abeilles sur la totalité de ces rayons en passant par dessous et sur les cotés fait qu’aucune soudure entre les étages ne se fait. Ce n’est pas le cas des rayons de miel qui vont être collés à l’étage d’en dessous.
On ne touche pas aux rayons de miel, lourds et fragiles (80 g de cire seulement pour contenir 1 k de miel) on risquerait de les casser. On les manipule par l’intermédiaire du corps qui les contient.
La récolte se fait en faisant tomber les rayons de miel d’un corps au dessus d’un grand tamis. Eclatés, légèrement malaxés, le miel tiède s’écoule rapidement. Les rayons ayant contenu du couvain, plus durs du fait des restes de cocons, seront pressés. La multiplication des colonies se fait naturellement par division. D’où le nom de ce type de ruche « divisible »
L’élevage des reines
Un des charmes de l’apiculture, pour nombre d’amateurs, tient au miel bien sûr mais pour ceux que la routine ennuie, l’élevage des reines en est une suite logique. La barrette simple n’est pas d’une grande commodité pour l’élevage des reines. Les rayons sont collés aux parois, ils contiennent du miel en leur sommet ce qui les rend fragiles. D’où l’utilisation des barrettes de Gilles DENIS ou des cadres de Marc Gatineau.
Gilles DENIS observe que les rayons sont soudés aux parois de la ruche sur le tiers de leur hauteur environ et que la suite du rayon est ovoïde. Pour rigidifier le rayon, il met deux jambe de 7 cm cloués à la barrette laissant un passage de 10 mm environ entre la jambe et la parois de la ruche. Les rayons deviennent parfaitement mobiles et solides.
On peut alors prélever quelques cadres et faire un élevage sur deux rayons avec une cellule de reine prête à éclore.
Ces rayons sont placés dans un corps que l’on partitionne de 3 cloisons faites d’une mince plaque de contreplaqué ou d’un carton ondulé pastique (polyéthylène alvéolé) enchâssés entre deux tasseaux fins cloués sur une planche bordée de tasseaux assurant 4 sorties, chacune sur une face de la ruche. Ce plateau de sol rudimentaire est réversible et sert de couvre cadre l’hiver.
Au sommet quatre planchettes équipées d’un trou de nourrisseur servent également de guide pour maintenir en place les cloisons. Il faut prendre la précaution d’entailler les barrettes pour faire le passage des portes cupules « Nicot » et l’installation des cellules de reines se fera sans problème. Ainsi avec un corps j’ai pu faire 4 nucléis d’élevage pour les reines.
Ce corps laissé sur place a récupéré ses butineuses et je me suis amusé à lui faire faire 1/4 de tour chaque jour pour répartir les butineuses entre les 4 nucléis. Les nourrisseurs sont de tout petits pots de confiture dont j’ai percé le couvercle de quelques trous avec une pointe, dents coté extérieur, retournés sur le trou du nourrisseur, le sirop ne coule pas, et les abeilles viennent le sucer tranquillement.
Avec les modifications des barrettes par Gilles Denis, ou leur remplacement par des cadres comme ceux de Marc Gatineau, nous ne sommes plus tout à fait dans la logique de l’Abbé Warré mais dans celle des éleveurs de reines.
D’ailleurs j’ai choisi d’expérimenter les Warré car elles m’ont semblé une bonne manière de remplacer mes Miniplus en polystyrène qui commencent à partir en morceaux.
Cohabitation des divers modèles de barrettes
La cohabitation de plusieurs modèles de barrettes dans une exploitation en Warré se comprend aisément.
Pour les colonies de production de miel et de reproduction d’essaims, les barrettes simples s’imposent. La construction des rayons achevée dans un corps, les rayons collent aux barrettes inférieurs et le passage de la reine d’un étage à l’autre se fait avec une grande rapidité.
C’est le but de ces barrettes très minces, car la reine est toujours gênée par des changements de température liées aux matériaux, aux intervalles trop grands entre le bas du cadre et le sommet du suivant. Son passage se fait bien lorsque des ponts de cires produisent une continuité entre tous les éléments de la ruche.
Le cadre « Gatineau » nous ramène à la conduite classique des Langstroth. Divisibles, dont on manipule les cadres avec aisance et la récolte se fait en extracteur. On travaille au cadre alors qu’avec la Warré traditionnelle on travaille au corps.
La formule est un peu rapide, j’en conviens, mais elle permet de mieux comprendre la différence de conduite des Warré par rapport aux autres modèles que nous connaissons bien.
Le choix se fera en fonction des options de l’apiculteur. La Warré traditionnelle a un avantage considérable, son coût est de moitié celui d’une Dadant ou d’une Langstroth, l’exploitation est encore plus économique, les barrettes ne sont pas cirées avec le même volume de cire qu’avec les cadres classiques, l’unicité absolue du matériel est un atout majeur pour de nombreuses manipulations.
C’est une ruche qui, équipée d’un nombre suffisant de corps peut faire l’objet de très peu de visites. Et laisser systématiquement un corps plein de miel aux colonies pour l’hiver est une économie de sirop et de manipulations considérables. D’autant que le nourrissement artificiel vieilli prématurément les abeilles de la colonie. La conduite de l’abbé Warré est davantage respectueuse de la physiologie de l’abeille.
Par contre la récolte du miel est plus délicate, l’élevage des reines plus complexe. On ne peut aisément chercher les reines et les marquer, il est presque impossible d’assurer leur suivi et leur remplacement régulier.
La productivité n’est pas à rechercher par ruche, mais la simplicité de la conduite permet de multiplier les colonies. Et par là même la multiplication des ruchers. C’est davantage une ruche pour rucher sédentaire que pour la transhumance.
On comprend aisément les aménagements de Gilles Denis ou ceux de Marc Gatineau qui apportent un compromis plus que satisfaisant au modèle d’origine sans retomber dans la situation des Langstroth.
Le site de Gilles DENIS : http://www.ruche-warre.com
Jean RIONDET