Avril Chauds / froids = essaimages en masse

Bonnes nouvelles, sous réserve de respecter les consignes ad hoc, les ruchers écoles peuvent reprendre leurs interventions de formation. Notre groupement d’action sanitaire apicole du Rhône le GASAR dispose de 4 ruchers de grande taille pour accueillir les stagiaires en respectant les distances et le nombre de personnes par rucher (gasarhone.fr)

Danger essaimage !

Depuis quelques semaines le temps est doux, les floraisons explosent et les colonies aussi. Le froid qui arrive sera propice aux essaimages massifs d’ici peu. C’est à dire dans la quinzaine suivant cette semaine. Les premiers essaims de cheminées sont arrivées au début de la dernière semaine de mars. Les lignées essaimeuses seront au rendez vous.

Une prévention de l’essaimage que je n’ai malheureusement pas cité suffisamment est de mettre au centre du nid à couvain dès la première ouverture possible un cadre à bâtisse libre amorcé d’une lame de cire gaufrée de 15 à 30 mm de hauteur. Ce cadre permet le passage des abeilles d’un rayon à l’autre ce qui évite de réduire les échanges de phéromones. Dès que les cirières sont en capacité de produire, le rayon est peu à peu construit et la reine y viendra très rapidement. On répète l’opération tant que la capacité cirières se manifestent, que les hausses ne sont pas encore là pour en gêner la pose, encore que si on visite les corps ce sera toujours le moment de le faire à nouveau. En période faste le cadres est construit et pondu en presque une semaine. Chaque année on assure ainsi 2, 3 et les bonnes années 4 ou 5 cadres de remplacement au centre du nid à couvain.

Avec les ruches fortes, que l’on aura boostées en hiver et qui seront sur 6 à 8 cadres de couvain on peut faire un essaim artificiel sur un cadre avec un cadre de nourriture 2 partitions réfléchissantes et du candi protéiné.

On peut renforcer les colonies faibles en leur apportant un cadre de couvain fermé sans ses abeilles. Ce sont des méthodes de prévention de l’essaimage qui sont douces sans toutefois assurer la fin du risque.

La division et la déviation des butineuses

L’absence certaine d’essaim naturel requière une division, mais l’éventail, la division simple réduisent largement l’espoir d’une récolte. Depuis le 19° siècle nombre de solutions furent explorées.

Démarée, Langstroth, Luizy, Snelgrove, Cloake, Schwartz… sont les plus connus de nos ancêtres ou contemporains à s’y être attelés. Reprenant ces diverses solutions qui ont toutes en commun d’isoler la reine à une étape des opérations, Pierre Cellier (TSA, Président du rucher du Médoc) propose une solution simple de mise en œuvre  qui permet de travailler dans un seul rucher et sans mettre un essaim en cave … Il a déjà exposé cette méthode ici même en 2019 et je l’ai fait intervenir, fin mars, dans le cours d’apiculture développé cette année sur Beehoo et ce fut un succès avec plus de 100 participants pour le webinaire mensuel. Il nous a présenté une évolution de sa méthode avec un plateau diviseur à 3 entrées, certes repris de Snelgrove mais sans la grille de ventilation.
Son système de division s’opère  sans recherche de la reine par superposition de deux corps, chacun doté de la moitié de la ruche souche. Cette technique permet d’éviter absolument l’essaimage même en période de fièvre d’essaimage, tout en assurant une récolte. Elle est bien adaptée aux mateurs ayant des ruchers de taille modeste (1 à 50 ruches)

La méthode

Le principe est de couper la colonie en deux parties égales du point de vue des cadres de couvain et de nourriture. Il y a un essaim sans reine et un essaim avec la reine.

Puis on superpose  les deux via un plateau diviseur doté d’entrées inférieures et sorties supérieures sur 3 côtés de manière à provoquer une déviation systématique des butineuses de l’élément où se trouvera la reine en haut vers l’essaim en formation en dessous. L’opération dure 3 semaines. Car chaque semaine on provoque une déviation. Entre 3 et 5 jours de nouvelles butineuses se reforment et au 7° jour on les envoie au rez de chaussée chez l’essaim. En 3 opérations, la souche ne peut plus avoir de velléités d’essaimer et l’essaim est surpuissant avec une reine nouvellement née. Une récolte sur les miellées de l’été est possible. En fin de saison on peut réunir les 2 colonies pour assurer le renouvellement régulier des reines

Le plateau diviseur

C’est une plaque mince, un contreplaqué de 10 mm par exemple que l’on borde sur les deux faces d’une baguette de 8 à 10 mm d’épaisseur et d’environ 24 mm de largeur  selon ce que l’on trouve.

Sur 3 côtés on opère des ouvertures dans les baguettes d’environ 10 cm avec portières. Important : les ouvertures seront sur chaque face au même endroit de manière à ce que les abeilles de l’essaim avec la reine habituées à sortir et rentrer en un point, si on ferme la porte, rentreront sans hésiter 1 cm plus bas, ce qui les conduira dans l’essaim.

Plateau Snelgrove originelIMG_1226

plateau Snelgrove

Voici le plateau Snelgrove originel avec ses 6 portières faites de cales et d’une ventilation centrale pour laisser passer la chaleur dont aura besoin l’essaim. Mais Pierre Cellier constate que cette ventilation est inutile puisqu’à la différence de Snelgrove il place l’essaim en bas qui sera, une fois par semaine, enrichi de butineuses qui apporteront le combustible requis (le nectar) pour assurer le chauffage.  Voici son plateau achevé.

le plateau de déviation des butineuses_DSC_0146_Moment_Moment(2)

plateau P Cellier

Pour conduire l’opération confortablement il faut 1 GR, 1 plateau diviseur, 1 ruche avec 4 cadres à bâtisse libre, 2 partitions réfléchissantes et 1 toit ou 1 support quelconque.

Jour J – 10 si besoin, on accentue la ponte par un nourrissement au sirop, si possible 2 l donnés au rythme de 250 ml tous les 2 jours rythme variable selon disponibilités de temps : 30 (sucre) / 70 (eau) ou 40/60.

Jour J La colonie souche sera divisée en 2 parties égales : on sort 4 cadres de couvain ouvert et fermé on les débarrasse de leurs abeilles en les secouant dans la ruche souche.

Ces cadres vides d’abeilles seront mis dans un corps de ruche, on y ajoutera des cadres de miel et pollen et deux cadres à bâtisses libres et 2 partitions réfléchissantes

Idem pour la souche dont on centrera le nid à couvain puis on posera sur chaque rive 1 cadre à bâtisse libre, les cadres de miel et les partitions réfléchissantes.

2 Division schéma_DSC_0147_

division en deux parties égales

Placer sur la ruche souche une Grille à Reine puis le corps contenant l’essaim. La reine se trouve nécessairement dans la ruche du bas. Superposer les deux ruches. Durant 24 h les abeilles du bas vont monter dans l’essaim pour s’occuper du couvain, ce sera une petite population sans butineuses.

4 Pose de la GR sur l'essaim avec reine schéma_DSC_0147_Moment(3)_Moment

pose de la grille à reine sur la souche

5 Division d'une forte colonie avec déviation des butineuses schéma_DSC_0148 - Copie_Moment

superposition de l’essaim sur la souche

                                                                                         

Jour J + 1 Enfumer légèrement pour inverser les 2 corps, retirer la GR et mettre le plateau diviseur à la place, entrée opposée à celle du plateau de sol. L’essaim qui était posé sur la ruche souche sera désormais posé en dessous. Il bénéficiera des butineuses qui entrent par le plateau de sol

Le plateau diviseur mis entre les deux ruches, son entrée arrière, supérieure, sera ouverte.

Les butineuses n’ayant pas le choix sortiront de ce côté mais entreront par le plateau de sol qu’elles connaissent. C’est la première déviation des butineuses du corps supérieur vers l’essaim.

Division d'une forte colonie avec déviation des butineuses schéma_DSC_0148 - Copie_Moment(3)

vue avant

Division d'une forte colonie avec déviation des butineuses schéma_DSC_0148 - Copie_Moment(2)

ouverture de la sortie arrière

6 Division d'une forte colonie avec déviation des butineuses schéma_DSC_0148_Moment(2)

pose du corps avec la reine

vue arrière

J + 8 Entre 3 et 5 jours le volume des butineuses se reconstituera et la souche sera alimentée. Si le temps était mauvais on lui apportera du sirop.

On opère la seconde déviation en fermant la porte arrière supérieure, on ouvre la porte arrière inférieure et on ouvre une porte latérale supérieure. Les butineuses vont sortir par la porte qu’elles trouvent et rentrer par l’arrière lieu qu’elles connaissent mais ne verront pas que la porte supérieure est fermée et elles passeront par la porte inférieure.Division d'une forte colonie avec déviation des butineuses schéma_DSC_0150_Moment(2)

J + 15 On procède de la même manière, on ferme la portière supérieure et on ouvre la portière inférieure et pour que les butineuses puissent sortir on ouvre la portière supérieure sur la face opposée du plateau. Ce sera la 3° déviation des butineuses.

J + 22 On déplace la ruche supérieure sur un plateau de sol et on a deux options

                  – soit on met la ruche du haut avec sa reine dans le rucher à 5m au moins et en la nourrit une fois. Elle va encore perdre ses butineuses et sera moins en forme pour faire une récolte de miel en été. On pose un couvre cadre nourrisseur sur le plateau diviseur dont on ferme la porte supérieure et on ouvre son homologue inférieure. Ce sera la 4° et dernière déviation.

                 – soit on déplace l’essaim du bas dans le rucher et on le conduira comme un essaim en surveillant la ponte de la reine qui devrait être effective. Si par hasard les abeilles n’avaient pas élevé de reine il faut soit en mettre une d’un élevage, soit mettre un cadre de couvain avec larves et œufs, soit réunir, la fièvre d’essaimage passée, ainsi que les grandes floraisons, la colonie n’aura plus de velléités d’essaimer, en principe !

Si en cours de division on trouve des cadres avec CR, les mettre dans l’essaim et n’en laisser que 2, inutile d’aller plus loin dans la visite du corps ou se trouve la reine. Étant affaiblie cette colonie détruira les CR et il n’y aura pas d’essaimage.

 

Merci à Pierre Cellier pour nous avoir fait partager son expérience

Auteur Jean Riondet

Apiculteur de longue date, Jean Riondet est un passionné qui aime apprendre et transmettre. Parallèlement à l’entretien de ses ruches, il enseigne l’apiculture depuis plus de 35 ans dans la région lyonnaise. Auteur d’un premier ouvrage, Un rucher dans mon jardin (Nathan, 1995), il rédige depuis l'an 2000 diverses rubriques d'abord dans la revue Abeilles et fleurs, puis dans la revue L'abeille de France. Il anime le blog de conseils apicoles sur Beehoo. Ses ouvrages actuellement disponibles : L'apiculture mois par mois - Le Rucher durable - Installer un premier rucher - Élever ses reines, trois méthodes simples. Il participe activement au Groupement d'action sanitaire apicole du Rhône (GASAR) qui assure la formation continue des apiculteurs du Rhône https://gasarhone.fr/ Jean Riondet est chevalier dans l'ordre du Mérite agricole

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