Oui, juillet est le mois de la dernière récolte et de la préparation de l’hivernage. Contrairement aux idées reçues, l’hivernage c’est maintenant, pas en septembre! Bonnes vacances pour les juillettistes, mais sale temps pour les mouches.
Nos mouches à miel vont avoir faim ! Juillet est un mois sec, les fleurs sont absentes, la campagne bruisse de tous les insectes nés au printemps, tout semble aller pour le mieux, pourtant la ponte de la reine s’arrête ou se ralentit considérablement car les abeilles ne trouvent plus de nourriture, les ruches seront peu remplie de miel, septembre arrivera et il sera trop tard pour refaire des colonies puissantes, en bonne santé et bourrées de miel pour passer un bon hiver.
L’hiver des colonies puissantes et en bonne santé, sur un stock de miel
C’est l’objectif à poursuivre.
Des colonies puissantes, ce sont des colonies riches en abeilles maintenant pour avoir encore une grosse population en septembre / octobre. Donc, nous devons pousser la ponte de la reine maintenant et jusqu’en septembre.
Des colonies en bonne santé, c’est traiter contre le varroa tout de suite. Puis continuer jusqu’en hiver. Les colonies parasitées meurent en cours d’hiver. On estime que les colonies présentant, en moyenne, un varroa par abeille ne peuvent survivre à l’hiver.
Mais la bonne santé est aussi liée au nombre des abeilles. Qu’une larve soit malade, une grosse colonie possédera toujours une « nettoyeuse » qui sortira la larve dehors et évitera la propagation des maladies.
Avoir des colonies sur un stock de miel : puisqu’on vient de leur voler leur butin, alors redonnons leur du sucre pour faire du miel.
Pousser la ponte de la reine
Ce sera une conséquence du nourrissement massif que l’on fera, mais il faut aussi surveiller les cadres de couvain qui vont régresser dans un premier temps.
Lorsque la récolte est achevée, on fait lécher les hausses puis on les range. Une belle pile bien étanche et on y fait brûler une fois par mois une moitié de mèche soufrée au sommet sous un toit en tôle; et ce jusqu’aux froids de novembre. Les hausses seront bien protégées des teignes.
Une fois cette opération faite, il faut surveiller le couvain.
Un gros couvain aujourd’hui, ce sera aussi un gros couvain en août puis en septembre…
Normalement, en cas de nourrissement massif, le nid à couvain est envahi par le nectar, la ponte de la reine s’en trouve limitée. Il faut alors mettre au centre du nid à couvain un cadre bâti vide, en son indisponibilité on mettra une cire vierge, mais il faut que la population soit vraiment très riche en nourrice pour construire rapidement. Quoi qu’il en soit, la cire sera construite plus ou moins rapidement et la reine viendra y pondre.
Jusqu’en octobre on surveillera le niveau du couvain. On ajoute autant que de besoin un cadre bâti au centre du nid, quitte à retirer un cadre plein de miel en rive et à le remettre plus tard une fois le couvain né et en régression.
Pour stimuler la ponte de la reine ne pas hésiter à apporter 1/2l de sirop par semaine après le fort nourrissement. Ceux qui l’ont fait en juin dans le froid et la pluie ont vu la ponte de la reine se maintenir et aujourd’hui leurs colonies sont populeuses.
Ne pas hésiter à ajouter 1% de levure de bière lyophilisée (au rayon diététique des magasins d’alimentation) dans le sirop pour donner aux abeilles un peu de protéines. Donner un coup de mixer dans le sirop, la levure de bière n’est pas franchement soluble.
Refaire les stocks de miel
Pour l’hiver, les abeilles ont besoin de beaucoup de miel et d’un miel sur des rayons pleins sur toute leur hauteur. En cas de froid persistants elles auront peu à se déplacer pour trouver du miel sinon, elles pourraient mourir de faim en un endroit de la ruche alors que du miel se trouverait plus loin. Des cadres à moitié pleins sont un risque de famine hivernale pour les colonies.
Dans les ouvrages apicoles du 19° siècle on récoltait le miel en mai pour laisser aux colonies le temps de refaire naturellement leurs réserves.
Passé juillet il n’y a plus guère de floraisons et les orages d’août sont très limités, la sécheresse des étés que nous avons connus rend la ressource alimentaire très insuffisante pour faire les stocks d’hiver et la ponte de la reine se met au diapason des faibles apports de nourriture.
Conséquence, des populations trop faibles sur des réserves insuffisantes.
La récolte faite on apporte alors des nourrisseurs couvre cadres pleins de sirop épais (1/3 d’eau et 2/3 de sucre blanc) ou des sirops du commerce spécialement étudiés pour l’apiculture, encore plus concentrés. On en apportera beaucoup, jusqu’à 15 l par ruche.
Il faut atteindre le poids de 20k en pesée arrière de la ruche. Pour quelques euros, les chinois vendent des pesons électroniques, on pose une très grosse vis dans le plateau de sol, au centre à l’arrière, on accroche le peson avec une rallonge en gros fil de fer, on tire sur le peson et lorsque la ruche se soulève le poids nous donne une indication du remplissage de la ruche.
Vous le vérifierez précisément, mais à 20 kg au minimum en pesée arrière les cadres de rive de la ruche sont pleins de miel. Si cette situation perdure jusqu’en octobre, nul besoin de nourrissement à prévoir l’hiver.
Fin août on devrait avoir des corps bien pleins, si tel n’est pas le cas enlever tous les cadres vides ou pleins au tiers de leur hauteur de manière à ce que les apports complémentaires comblent les espaces disponibles. Poursuivre le nourrissement concentré jusqu’au 15 septembre. Une colonie sur 5 cadres passe parfaitement l’hiver. On peut donc restreindre l’espace des ruches jusqu’à 5 cadres.
Pour assurer une bonne température dans la ruche on partitionne cet espace vide par une plaque de polystyrène extrudé ou une partition en bois. Veiller à ce que la partition affleure le couvre cadre.
Que se passe-t-il ?
La colonies ayant des cadres pleins de miel, l’espace ne pouvant plus contenir de miel, les abeilles ne deviendront pas toutes des butineuses. Beaucoup resteront dans la ruche à manger du pollen apporté par celles devenues butineuses, puis elles dévoreront du couvain ouvert. Leur organisme s’enrichira de « corps gras », qui assurent leur régulation biologique et leur permettront de rester « jeunes ». Leurs glandes hypopharyngiennes seraient stoppées dans leur évolution et capables de produire de la gelée royale trois à quatre mois plus tard.
Préserver ces abeilles set stratégique car les mortalités de mars sont souvent des mortalités normales d’abeilles vieillies prématurément.
Pourquoi aujourd’hui veiller à ce paramètre et pas autrefois ?
D’abord les mortalités de mars ne sont pas nouvelles, certaines années nous avons déjà connu dans le passé des casses pas racontables.
Mais surtout, l’appauvrissement des ressources alimentaires est considérable, les prairies sont souvent constituées de plantes qui ne fleurissent plus l’été, les fauchages précoces pour faire plusieurs récoltes de fourrages empêchent les herbes de fleurir et certaines sont mellifères. Les monocultures se sont développées. Enfin, la pression des pesticides, insecticides et fongicides affaiblissent les abeilles et raccourcissent leur durée de vie.
Dans la santé de l’abeille de 1994 j’ai trouvé un article relatant des études montrant que la durée moyenne de vie d’un groupe d’abeille se situe aux alentours de 170 jours, il semblerait qu’aujourd’hui on ne dépasse guère 150 jours et que la norme serait d’environ 110 jours.
L’écart serait donc de deux mois, ce qui signifie qu’aujourd’hui nous disposons difficilement d’un grand nombre d’abeilles capables de produire de la gelée royale en mars. Faites le calcul à partir des abeilles nées jusqu’en début de novembre.
Cette arithmétique biologique nous conduit à veiller à la survie du plus grand nombre possible d’abeilles « jeunes » puis de surveiller le nourrissement en hiver et relancer la ponte au plus tôt au cœur de l’hiver pour produire de nouveau des nourrices, mais nous y reviendrons plus tard.
Des abeilles en bonne santé
Nous devons agir sur toutes les pathologies, si la loque est présente seule la destruction par le feu des abeilles et du couvain est possible. Une mèche soufrée en un soir sur le plateau de sol et le lendemain on brûle les abeilles, les cadres, on flambe le sol au chalumeau, on passe à la flamme corps et plateaux de sol, couvres cadres et outils de travail. on lave les biaudes à l’eau de javel, les gants ….
A cette époque de l’année aucun espoir de garder en vie une ruche loqueuse traitée par la technique de l’essaim nu, c’est fini, plus de développement possible des nouvelles colonies.
Le varroa se traite dès maintenant avec des produits à base de Thymol, il semblerait que l’Apilife var donne de bons résultats car il combine plusieurs huiles essentielles. Ces traitements sont insuffisants car ils se font en présence de couvain et n’empêchent pas la reproduction des varroas. On fait seulement baisser la pression du parasite. Durée un mois. C’est un traitement d’ambiance, donc, selon la température, l’humidité, les vapeurs de thymol sont plus ou moins abondantes et soit le traitement ne sert pas à grand chose soit l’odeur insupporte les abeilles qui font la grappe sous la ruche !
Après quoi on traitera avec des lanières à base d’Amitraze et disposant d’une AMM. C’est impératif, les bricolages maison sont sans effet réel, des bandes de carton trempées dans de l’huile contenant du Taktic, n’ont d’effet que 72 heures ! L’Amitraze se décompose à l’humidité, seules les lanières fabriquées avec des procédés ad hoc ont des durées de diffusion de plusieurs mois. Mettre les lanières dans le nid à couvain,elles agissent par contact sur les abeilles, et les retirer lors de la disparition du couvain. Bien les maintenir dans le nid à couvain, les déplacer si besoin.
Ces règles devraient permettre de limiter une casse généralisée encore cet hiver.
Jean Riondet Cdrom Un rucher dans mon jardin et « l’apiculture mois par mois » ed Ulmer